DOCUMENT V
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Le marxisme et la guerre d'Espagne
L'extension du joug communiste à la moitié de l'Europe, à la Chine, au Viet-Minh, l'influence du bolchevisme en Orient et l'habile propagation de l'idéologie marxiste dans presque tous les pays, nous font oublier les événements qui, pour être plus anciens, n'en prouvent pas moins la malfaisance du communisme.
Ces événements sont pourtant une leçon et un espoir. Ils nous montrent que le triomphe du communisme n'est pas fatal quand on sait opposer à sa dialectique de contradictions et de destructions, les forces saines du pays, celles qui se fondent sur d'authiques traditions chrétiennes et sur l'harmonieuse ordonnance des valeurs propres à une nation.
À cet égard, l'exemple de la guerre d'Espagne (1936-1939) est particulièrement instructif. Nous nous bornerons, pour en parler, à citer les textes des Papes Pie Xl et Pie XII ou ceux des Évêques espagnols, désireux de ne traduire ici que la pensée exprimée par le Souverain Pontife et la Hiérarchie, en dehors de toute appréciation qui ne relèverait plus de la doctrine mais de l'opinion.
LA RÉVOLUTION MARXISTE EN ESPAGNE ÉTAIT PRPARÉ DE LONGUE DATE:
Le recul du temps nous fait parfois oublier que la révolution ne fut pas un phénomène subit en Espagne. Dès le 3 juin 1933 le Pape Pie Xl adressait à l'épiscopat de cette nation l'Encyclique «Dilectissima nobis». Le Saint-Père écartait, tout d'abord, la question du régime républicain, instauré en 1931, comme n'étant pas du ressort de l'Église.
«Il est évident pour tous, disait-il, que l'Église catholique, sans s'attacher à une forme de gouvernement plutôt qu'à une autre, pourvu que soient sauvegardés et protégés les droits de Dieu et de la conscience chrétienne, ne fait aucune difficulté pour s'accorder avec toutes les institutions civiles: qu'elles aient la forme royale ou républicaine, qu'elles soient sous le pouvoir aristocratique ou populaire.»
Mais le gouvernement espagnol a voté une loi qui prive l'Église de tous ses biens, écarte les religieux de l'enseignement et dissout plusieurs congrégations.
«Ce Nous a été une cause de grand étonnement et e de profonde douleur que certains parmi ceux qui combattent l'Église aient osé, pour justifier leurs attaques, affirmer publiquement que leurs projets leur étaient imposés par la nécessité de défendre la République.
Pareil argument est évidemment si calomnieux et e si faux qu'il nous est permis de conclure justement que la lutte menée contre l'Église espagnole a moins pour cause l'incompréhension de la foi catholique et de ses œuvres bienfaisantes que la haine et l'hostilité que favorisent et poursuivent contre le Seigneur et contre son Christ les destructeurs de tout ordre religieux et civil, groupés en Sociétés secrètes, comme on le voit au Mexique et dans la République russe.»
LA GUERRE CIVILE
Le Cardinal Archevêque de Tolède, Monseigneur Goma y Tomas, publiait, de Pampelune, en novembre 1936, un document sur la guerre civile. Il en montrait tout d'abord le caractère typiquement marxiste. C'est vraiment la lutte de l'idéologie dialectique contre le christianisme.
«Cette guerre affreuse est, au fond, une guerre de principes, de doctrines, la guerre d'une conception de la vie et de la réalité sociale contre une autre, d'une c civilisation contre une autre. C'est la guerre que soutient l'esprit chrétien espagnol contre cet autre esprit, si on peut l'appeler esprit, qui voudrait fondre tout l'humain, depuis les sommets de la pensée jusqu'aux petitesses de la vie journalière, dans le moule du matérialisme marxiste. D'un côté les combattants de toutes idéologies qui représentent partiellement ou intégralement la vieille tradition et la vieille histoire de l'Espagne; de l'autre côté, un conglomérat informe de combattants dont le but principal est, plus que le triomphe sur l'ennemi, la destruction de toutes les valeurs de notre vieille civilisation.
Il montrait ensuite les ruines accumulées par cette guerre des doctrines perverses contre la civilisation chrétienne: «... On n'a jamais vu dans l'histoire d'aucun peuple, un ensemble d'horreurs comme celles qui se produisirent en Espagne pendant ces quatre mois. Des milliers de prêtres et de religieux ont succombé, parmi eux dix évêques, parfois au milieu de scènes honteuses et de tourments inouïs. Le Prêtre, c'est l'homme de «Dieu»: et pour annihiler Dieu, les «sans-Dieu» et les «contre-Dieu» devaient éliminer ses représentants de la Société. Quand l'hécatombe des oints du Seigneur parviendra à la connaissance du monde entier, car aujourd'hui elle est encore un secret qui se cache dans les régions non conquises, elle apparaîtra vraiment effrayante.
Avec les «ministres de Dieu», les maisons de «Dieu» eurent aussi à souffrir. Un nombre considérable d'églises, dont beaucoup étaient l'orgueil de l'art, la synthèse de notre histoire, toutes chargées des trésors de piété que les siècles avaient accumulés en elles, centres vivants de la foi traditionnelle de notre peuple, ont été incendiées et beaucoup jusqu'au ras du sol. La disparition de chefs-d'œuvre qui auraient pu former une collection unique au monde a causé à l'art espagnol un dommage irréparable.
La destruction de bibliothèques et d'archives, la profanation de sépultures, les attentats contre les vierges consacrées à Dieu, le meurtre d'enfants innocents, les formes de la férocité la plus répugnante dans les milliers d'assassinats commis, l'instinct sacrilège qui a poussé ces hommes sans Dieu ni loi à la destruction de ce qu'il y a de plus représentatif de notre civilisation chrétienne, surtout les saintes images de Jésus-Christ et de la Très Sainte Vierge, voilà le caractère inhumain de cette explosion de passions sauvages qui ont bouleversé, depuis qu'éclata la guerre, la société espagnole...
Il faut y joindre cette décapitation de l'état-major catholique, ces massacres des «droitiers» qualifiés, c'est-à-dire des chrétiens exemplaires, chefs des organisations religieuses de toute nuance, qui ont succombé par milliers sans autre crime que la profession de la foi de leurs ancêtres et leurs travaux d'apostolat, sans autre jugement que le caprice des ennemis de nos organisations chrétiennes.
N'omettons pas un fait terrible: la destruction systématique de la richesse privée et nationale et de leurs sources. La richesse est la force et le lien de tout système social et politique. Elle était, avec tous les défauts de notre structure économique, la force de l'Espagne traditionnelle. Il fallait la détruire, et cela d'autant plus que la conception marxiste ou communiste de l'État n'a ni philosophie, ni âme, ni valeur autres que le monopole de la richesse matérielle. De là vient la systématique et immense spoliation que nous avons subie. La fortune privée et publique, quand cela fut possible, est passée aux mains des dirigeants.
Voici le processus: abolition de la propriété privée, confiscation des biens, interversion des comptes, soviétisation des exploitations et industries, dépôt à l'étranger de l'or de l'État, persécution systématique et souvent assassinat - des directeurs des grandes industries, confiscation des immenses trésors artistiques. Ainsi, l'ancien régime a été privé de ses plus fermes soutiens, ainsi ont été comblés les vides creusés par l'ambition personnelle, et une richesse énorme est entrée dans les coffres du futur État soviétique. Ainsi, dans la mesure où l'ont voulu les révolutionnaires, ont été démantelés l'âme et le corps de l'Espagne.»
LES CAUSES DE LA GUERRE CIVILE
Monseigneur Goma y Tomas notait, comme causes lointaines de la révolution... «le travail tenace de plusieurs années d'inoculation de doctrines étrangères dans l'âme du peuple; la législation impie, déterminée par la pression des Sociétés secrètes de caractère international; le prosélytisme de Moscou aidé par le courant d'or qui, sans cesse, affluait en Espagne, produisant la trahison des dirigeants et la perversion des masses; la mystique fascinatrice du communisme exotique, l'âme tartare, le génie de l'internationalisme étranger...»
Quant aux causes immédiates:
«Ce n'est pas ici le lieu d'indiquer les défauts de notre race et de nos coutumes sociales; nous voulons seulement rechercher, d'après notre jugement, la cause immédiate du désastre.
L'oubli de nos traditions et de notre histoire; ce prurit, vieux de deux siècles, qui nous a fait copier servilement l'étranger dans le domaine littéraire, législatif et moral; l'incompréhension des problèmes du moment; l'instabilité des charges politiques; l'orientation plébéienne de nos démocraties; la comédie du parlementarisme et les mensonges du suffrage; la formation défectueuse de la conscience nationale et la désorientation dans les problèmes internationaux; l'égoïsme et la fourberie en politique; la maladie des nationalismes particularistes, et, de l'autre côté, l'organisation administrative d'un État géométrique ne tenant aucun compte des conditions ou des tempéraments particuliers: chacun de ces points serait un chapitre du livre de notre décadence.»
Conséquences pour l'Espagne même: son morcellement en républiques de type soviétique, les cris de «Vive l'Espagne russe», l'exacerbation de tout ce qui divise un peuple et l'asservit.
De tels maux ne menacent pas seulement l'Espagne. Que les autres peuples comprennent la leçon.
«Aux peuples frères, à ceux qui compatissent à nos «malheurs, à ceux qui traversent les mêmes dangers, nous disons de s'amender à notre exemple; qu'ils ne se croient pas immunisés contre le mal qui a empoisonné l'âme de notre peuple et l'a conduit aux affres de la mort. Toute société est une culture dans laquelle le communisme proliférera si Dieu, qui est la vie et le bien des esprits, en est absent, ainsi que l'autorité qui émane de Dieu, garante de la justice et de l'ordre social. « Crise de Dieu, crise d'autorité, elles existent aujourd'hui dans la presque totalité des peuples.»
LA LETTRE COLLECTIVE DE L'ÉPISCOPAT ESPAGNOL
Le 1er juillet 1937 les Évêques espagnols adressaient «à ceux du monde entier» une lettre collective à propos de la guerre civile.
Le but de leur lettre, précisaient-ils, est d'éclairer les catholiques des autres pays, trompés souvent par des informations tendancieuses, sur la vraie situation de l'Espagne.
«C'est un fait, et prouvé par une abondante documentation, que la pensée d'une grande partie de l'opinion étrangère ne coïncide pas avec ce qui a eu lieu réellement dans notre pays. Il se peut que les causes de cette erreur soient: l'esprit anti-chrétien, qui a vu dans la querelle de l'Espagne une partie décisive se jouant pour ou contre la religion de Jésus-Christ et la civilisation chrétienne; le courant opposé de doctrines politiques qui prétendent à l'hégémonie du monde; le travail tendancieux des forces occultes internationales; enfin l'antipatrie, se servant de certains espagnols égarés, qui se prévalent de leur qualité de catholiques, et ont ainsi causé un tort énorme à la véritable Espagne. Et ce qui nous fait le plus de chagrin, c'est e qu'une grande partie de la presse étrangère ait contribué à cette «déviation» intellectuelle qui pourrait être funeste aux intérêts sacrés pour lesquels on lutte dans e notre patrie.»
LES DÉBUTS DE LA RÉVOLUTION
Trop souvent les catholiques étrangers ignorent les souffrances de leurs frères espagnols, les persécutions qu'ils subissent, la façon dont fut déclenchée la révolution.
«L'incendie des temples à Madrid et dans les provinces en mai 1931, les révoltes du mois d'octobre 1934, spécialement en Catalogne et en Asturies, où l'anarchie régna pendant deux semaines: la période turbulente qui va de février à juillet 1936, pendant laquelle furent détruites ou profanées 411 églises et furent commis environ 3 000 graves attentats d'ordre politique et social, présageaient la ruine totale de l'autorité publique, qu'on a vu souvent céder à la force des pouvoirs occultes qui surveillaient son fonctionnement.
Notre régime politique de liberté démocratique fut ébranlé par les procédés arbitraires de l'autorité de l'Etat et par la co-action gouvernementale qui faussa la volonté populaire, en montant une machine politique contre la majorité de la nation, de sorte que, aux élections parlementaires du mois de février 1936, et avec plus d'un demi-million de voix de majorité sur les gauches, les droites obtinrent 118 députés de moins que le Front populaire; et cela parce qu'on avait annulé arbitrairement les votes de provinces entières. Ainsi fut viciée, dès son origine, la légitimé du Parlement...
Le 27 février 1936, et à l'occasion du triomphe du Front Populaire, le Komintern décrétait la Révolution espagnole et la finançait, au moyen de sommes exorbitantes. Le 1er mai suivant, des centaines de jeunes gens réclamaient publiquement à Madrid des bombes, des pistolets, de la poudre et de la dynamite pour la prochaine Révolution. Le 16 du même mois, le représentant de l'U.R.S.S. se réunissait à la Maison du Peuple, à Valence, avec des délégués espagnols de la IIIe Internationale, et voici le neuvième de leurs accords: «Charger l'un des secteurs de Madrid (désigné par le numéro 25 et composé de policiers en activité) d'éliminer les personnages politiques et militaires destinés à jouer un rôle intéressant dans la contre-Révolution». Pendant ce temps, de Madrid jusqu'aux villages les plus éloignés, les milices révolutionnaires recevaient l'instruction militaire et on les armait abondamment tant et si bien que, au moment où éclata la guerre, ils comptaient 150 000 soldats d'assaut et 100 000 de choc.
Il se peut, Vénérables Frères, que l'énumération de ces faits vous paraisse indigne d'un document épiscopal. Nous avons néanmoins tenu à la substituer aux raisons de droit politique qui pouvaient justifier un mouvement national de résistance. Sans Dieu, qui doit être à la base et au sommet de la vie sociale, et sans l'autorité, que rien ne peut remplacer dans ses fonctions de créatrice de l'ordre et de conservatrice du droit civil; et d'autre part, avec la force matérielle au service des sans-Dieu et des sans-conscience, manœuvrés par des agents puissants, d'espèce internationale, il était fatal que l'Espagne glissât vers l'anarchie, qui est le contraire du bien commun, de la justice et de l'ordre social. C'est à ce degré qu'en sont tombées les régions espagnoles où la révolution marxiste a suivi son cours normal.»
LE SURSAUT NATIONAL
«Il reste donc acquis, comme première affirmation de cet écrit, que cinq ans d'outrage aux sujets espagnols dans l'ordre religieux et social avaient mis en danger l'existence même du bien public et produit une tension énorme dans l'esprit du peuple espagnol; qu'une fois épuisés les moyens légaux, l'idée était entrée dans la conscience nationale qu'il n'y avait plus de recours qu'en la force pour maintenir l'ordre et la paix; que des pouvoirs étrangers à l'autorité tenue pour légitime, avaient décidé de renverser l'ordre constitué et d'instaurer le communisme par la violence; et enfin que, de par la logique fatale des faits, l'Espagne n'avait que cette alternative: ou périr sous l'assaut définitif du communisme destructeur, déjà préparé et décrété, comme cela est arrivé dans les régions où le mouvement national n'a pas triomphé, ou tâcher, dans un effort titanesque, de se débarrasser de ce redoutable ennemi et de sauver les principes fondamentaux de sa vie sociale et de ses caractéristiques nationales.»
Les Evêques citaient les faits à l'appui de cette affirmation.
LA BARBARIE COMMUNISTE
«Peu de temps avant la révolte, étaient arrivés de Russie 79 agitateurs spécialisés. La Commission nationale d'unification marxiste, à ce moment-là, ordonnait la constitution de milices révolutionnaires dans toutes les villes. La destruction des églises ou au moins de leur mobilier fut systématique et en série. Dans le court intervalle d'un mois, tous les temples furent rendus inutilisables au culte. Dès 1931, la Ligue athée comprenait dans son programme un article ainsi conçu: « Plébiscite sur la destination qu'on doit attribuer aux églises et maisons paroissiales»; et un des Comités provinciaux énonçait cette règle: «Le local ou les locaux consacrés jusqu'à présent au culte seront destinés à des magasins collectifs, marchés publics, bibliothèques populaires, maisons de bains ou d'hygiène publique, etc., selon les besoins de chaque ville.» Pour l'élimination des personnes en vue que l'on considérait comme ennemies de la révolution, on avait établi préalablement des «listes noires». Dans certaines, et en première place, figurait l'évêque. Quant aux prêtres, un chef communiste avait dit, devant l'attitude du peuple qui voulait sauver le curé de sa paroisse: «Nous avons l'ordre de détruire toute cette graine.»
La preuve la plus éloquente que la destruction totale des temples et le massacre total des prêtres étaient une chose préméditée, c'est le nombre épouvantable des victimes. Quoique les chiffres ne soient pas encore fixés, nous pouvons compter près de 20 000 églises détruites ou entièrement pillées. Le nombre des prêtres assassinés (en moyenne 40 pour 100 dans les diocèses dévastés, dans quelques-uns cela va jusqu'à 80 pour 100) s'élève, pour le seul clergé séculier, à environ 6 000. On les chassa avec des chiens; on les poursuivit à travers les montagnes; on les traqua avec acharnement dans toutes les cachettes possibles. On les tua sans procès, le plus souvent sur-le-champ, sans autre raison que leur fonction sociale de prêtres...»
LA RÉVOLUTION FUT À LA FOIS ANTI-ESPAGNOLE ET ANTI-CHRÉTIENNE
«Cclte révolution fut essentiellement «anti-espagnole.» L'œuvre de destruction fut accomplie aux cris de: «Vive la Russie!», à l'ombre du drapeau international communiste. Les inscriptions murales, l'apologie de personnages étrangers, les commandements militaires aux mains de chefs russes, la spoliation de la nation en faveur de métèques, l'hymne international communiste, autant de preuves, et suffisantes de la haine portée à l'esprit national et au sentiment de la patrie.
Mais surtout, cette révolution fut «antichrétienne». Nous ne croyons pas que, dans l'histoire du christianisme, et dans un laps de si peu de semaines, se soit produite une telle explosion de haine contre Jésus-Christ et sa sainte religion. Dévastation si sacrilège que le délégué des rouges espagnols, envoyé au Congrès des «sans-Dieu», à Moscou, a pu déclarer: L'Espagne a surpassé de beaucoup l'œuvre des Soviets, car l'Église, en Espagne, a été complètement anéantie.
Les martyrs se comptent par milliers; le témoignage qu'ils ont porté est une espérance pour notre pauvre patrie; mais peut-être ne trouverions-nous pas, dans le Martyrologe romain, une forme de martyre non employée par les communistes, sans en excepter la crucifixion, et d'autre part, les objets et les machines modernes ont permis de nouveaux supplices.
La haine envers Jésus-Christ et la Vierge est arrivée au paroxysme, et, dans les centaines de crucifix poignardés, dans les images de la Vierge bestialement souillées, dans les affiches placardées à Bilbao, où l'on blasphémait sacrilègement la Mère de Dieu, dans l'infâme littérature des tranchées rouges où l'on ridiculise les mystères divins, dans la profanation réitérée des images sacrées, nous pouvons deviner la haine de l'enfer, incarné en ces malheureux communistes. «J'avais juré de me venger de toi», criait l'un d'eux à notre Seigneur enfermé dans le tabernacle. Et, déchargeant son pistolet, il ajoutait: «Rends-toi aux rouges, rends-toi au marxisme.»
La profanation des reliques sacrées a été épouvantable: on a détruit ou brûlé les corps de saint Narcisse, de saint Pascal Bailon, de la bienheureuse Béatrice de Silva, de saint Bernard Calvo et de bien d'autres. Les formes assumées par la profanation ont été si invraisemblables qu'on ne peut pas les concevoir sans supposer une suggestion diabolique. Les cloches ont été brisées et fondues. Le culte, absolument supprimé dans tout le territoire communiste, à l'exception d'une petite portion du Nord. Grand nombre de temples, parmi lesquels de vrais joyaux d'art, ont été totalement dévastés: à cette œuvre inique on a forcé à travailler de pauvres prêtres. Des images fameuses, objets de la vénération séculaire, ont disparu pour toujours, détruites ou brûlés. En maintes localités, l'autorité a obligé les citoyens à livrer tous les objets religieux leur appartenant pour les détruire publiquement; qu'on juge ce que cela représente dans l'ordre du droit naturel, des liens de famille et comme violence faite à la conscience chrétienne.»
LE MYTHE DE LA GUERRE DES «CLASSES»
La provocation à tant de crimes n'incombe pas à l'Espagne, mais au communisme international importé de Russie, lequel est fort peu soucieux d'améliorer le sort des pauvres.
«On dit que cette guerre est une guerre de classes et que l'Église s'est rangée du côté des riches... Eh bien! c'est justement en Espagne que la plupart des régions pauvres se sont libérées des horreurs de la guerre. Et c'est dans les provinces où le coefficient la richesse et du bien-être du peuple était le plus grand que la révolution fut le plus acharnée. Oublierons-nous notre législation sociale et nos institutions prospères de bienfaisance et d'assistance publique et privée, toutes d'origine espagnole et très chrétienne. Le peuple a été trompé par des promesses irréalisables, incompatibles non seulement avec la vie économique du pays, mais encore avec n'importe quel genre de vie économique organisée. Telle est la situation: d'une part des régions indemnes où tout marche bien, et de l'autre, du côté de la domination communiste: la misère.»
Bien des Espagnols ont été trompés par les fausses théories.
«Cette haine de la religion et des traditions patriotiques, prouvée par le fait que tant de choses sont perdues pour toujours, cette haine est venue de Russie, importée par des Orientaux à l'esprit pervers. Pour l'excuse de tant de victimes, envoûtées par une «doctrine de démons», rappelons qu'au moment de mourir, condamnés par la loi, nos communistes se sont, dans leur immense majorité, réconciliés avec le Dieu de leurs pères. A Majorque, il n'en est mort dans l'impénitence que 2 pour 100; dans les régions du Sud, pas plus de 20 pour 100, et dans celles du Nord peut-être pas 10 pour 100. C'est une preuve de la tromperie dont a été victime notre peuple.»
LES INGÉRENCES D'IDÉOLOGIE ERRONÉES DANS LA LUTTE CONTRE LE MARXISME
La presse étrangère accusait les armées nationales de cruautés. Les évêques répondent:
«Il y a un écart énorme, infranchissable entre les deux partis, en ce qui concerne les principes de la justice et la façon de l'administrer. Bien plus, nous pourrions dire que les actes du Front populaire n'ont été qu'une suite terrible d'offenses à la justice, à Dieu, à la société et aux hommes. On ne peut pas parler de justice quand on élimine Dieu, principe de toute justice. Tuer pour tuer, détruire pour détruire, dépouiller l'adversaire non belligérant, tels sont les principes de conduite civile et militaire que nous voyons observés par les uns et qu'on ne saurait imputer aux autres sans mensonge.»
DÉCLARATION DU PAPE PIE XI
Recevant des réfugiés espagnols le 14 septembre 1936, le Pape Pie Xl déclarait:
«On dirait qu'une satanique préparation a rallumé, et plus vive encore, dans la voisine Espagne, cette flamme de haine et de persécution plus féroce, réservée, de l'aveu même de ses ennemis, à l'Église et à la religion catholique, car elle est l'unique véritable obstacle au déchaînement de ces forces qui ont déjà fait leurs preuves et donné leur mesure dans l'essai de renversement de tous les ordres, de la Russie à la Chine, du Mexique à l'Amérique du Sud, preuves et préparations précédées, accompagnées incessamment d'une universelle, assidue et très habile propagande pour la conquête du monde entier à ces absurdes et désastreuses idéologies qui, après avoir séduit et fait fermenter les masses, ont pour but de les armer et de les lancer contre toute institution humaine et divine...
Au-dessus de toute considération politique terrestre, Notre Bénédiction s'adresse d'une manière spéciale à tous ceux qui ont assumé la difficile et périlleuse tâche de défendre et de restaurer les droits et l'honneur de Dieu et de la religion, c'est-à-dire les droits et la dignité des consciences, première condition et la plus solide base de tout bien-être civil et humain.»
À la fin de cette allocution, le Pape montre combien cette tâche est «difficile et périlleuse», car la défense risque parfois d'être «excessive et non entièrement justifiable» et il peut s'y mêler « des intentions moins droites et d intérêts égoïstes ou «de parti qui interviennent pour troubler et altérer toute la moralité de l'action et toutes les responsabilités.»
Car la lutte du peuple espagnol contre le marxisme devint bientôt une véritable guerre internationale où le nazisme et le fascisme se taillèrent leur part.
C'est pourquoi le Pape, dans son radio-message du 24 décembre 1936 montre l'équivoque de «ceux qui affirment être les défenseurs de l'ordre contre les forces subversives, de la civilisation contre les débordements du communisme athée et qui vont même jusqu'à s'arroger la primauté sur ce terrain ... (mais qui) se laissent dominer et guider par des idées fausses et funestes.»
LA VICTOIRE DES ARMES CATHOLIQUES
Mais, après de longues souffrances, l'Espagne chrétienne connaissait enfin la victoire.
Dans un radio-message à la nation espagnole, le 16 avril 1939, le pape Pie XII disait:
«Avec une immense joie, Nous Nous adressons à vous, très chers Fils de la catholique Espagne, pour vous exprimer Nos paternelles félicitations pour le don de la paix et de la victoire par lesquelles Dieu a daigné couronner l'héroïsme chrétien de votre foi et de votre charité, éprouvé par tant et de si généreuses souffrances... Les desseins de la Providence, très chers Fils, se sont manifestés une fois encore sur l'héroïque Espagne. La nation choisie par Dieu comme principal instrument d'évangélisation du Nouveau Monde et comme rempart inexpugnable de la foi catholique vient de donner aux prosélytes de l'athéisme matérialiste de notre siècle la preuve la plus élevée qu'au-dessus de tout se placent les valeurs éternelles de la religion et de « l'esprit... »