DOCUMENT II
DOCUMENTS PONTIFICAUX
LETTRE ENCYCLIQUE
aux Patriarches, Primats, Archevêques,
Évêques et autres Ordinaires en paix et
Communion avec le Siège Apostolique
sur le communisme athée (*)
«Divini Redemptoris»
Pie XI. Pape
Vénérables frères. Salut et Bénédiction apostolique
1. La promesse d'un Rédempteur illumine la première page de l'histoire humaine; aussi, la ferme espérance de jours meilleurs adoucit le regret du paradis perdu et soutint le genre humain cheminant au milieu des tribulations; mais, quand fut venue la plénitude des temps, le Sauveur du monde, par son apparition sur terre, combla l'attente et inaugura, dans tout l'univers, une nouvelle civilisation, LA CIVILISATION CHRÉTIENNE, autrement plus parfaite que tous les progrès réalisés jusque-là, au prix de tant d'efforts, chez certains peuples privilégiés.
2. Mais, la lutte entre le bien et le mal, triste héritage de la faute originelle, continua à sévir dans le monde; l'ancien tentateur n'a jamais cessé, par ses promesses fallacieuses, de tromper le genre humain. C'est pourquoi, au cours des siècles, on a vu les bouleversements se succéder jusqu'à la révolution actuelle, qui est déjà déchaînée ou qui devient sérieusement menaçante presque partout, peut-on dire, et dépasse, par l'ampleur et la violence, ce qu'on a éprouvé dans les persécutions antérieures contre l'Église. Des peuples entiers sont exposés à retomber dans une barbarie plus affreuse que celle où se trouvait encore la plus grande partie du monde à la venue du Rédempteur.
3. Ce péril si menaçant, Vous l'avez déjà compris, Vénérables Frères, c'est le COMMUNISME BOLCHEVIQUE ET ATHÉE, QUI PRÉTEND RENVERSER L'ORDRE SOCIAL ET SAPER JUSQUE DANS SES FONDEMENTS LA CIVILISATION CHRÉTIENNE.
I. ATTITUDE DE L'ÉGLISE EN FACE DU COMMUNISME
Condamnations antérieures
4. En face d'un pareil danger, l'Église Catholique ne pouvait se taire et, en fait, elle n'a pas gardé le silence. Le Siège Apostolique, qui a pour mission spéciale la défense de la vérité, de la justice, de tous les biens éternels niés et combattus par le communisme, le Siège Apostolique, tout particulièrement, n'a pas manqué d'élever la voix. Depuis l'époque où des groupes intellectuels prétendirent libérer la civilisation humaine des liens de la morale et de la religion, Nos Prédécesseurs attirèrent l'attention du monde, d'une façon claire et explicite, sur les conséquences de la déchristianisation de la société humaine. Quant au communisme, déjà en 1846, Notre vénéré Prédécesseur, Pie IX, de sainte mémoire, portait une condamnation solennelle, confirmée plus tard dans le Syllabus, contre «cette doctrine néfaste qu'on nomme le communisme, radicalement contraire au droit naturel lui-même; pareille doctrine, une fois admise, serait la ruine complète de tous les droits, des institutions, des propriétés et de la société humaine elle-même»(1). Plus tard, Notre Prédécesseur, Léon XIII, d'immortelle mémoire, dans son Encyclique Quod Aposlolici muneris, définissait le communisme: «Une peste mortelle qui s'attaque à la moelle de la société humaine et qui l'anéantirait.» (2) Avec clairvoyance Léon XIII montrait qu'à l'origine de l'athéisme des masses, en cette époque de progrès technique, se trouve une philosophie qui, depuis des siècles, tente de séparer la science et la vie de la foi et de l'Église.
Actes du présent Pontificat
5. Nous-même, durant Notre pontificat, Nous avons souvent dénoncé, et avec une pressante insistance, les courants d'athéisme qui croissent d'une façon alarmante. En 1924, quand Notre mission de secours revenait des pays de l'Union Soviétique, Nous avons protesté contre le communisme, dans une allocution spéciale, qui s'adressait au monde entier (3). Dans Nos Encycliques Miserentissimus Redemptor (4), Quadragesimo anno (5), Caritate Christi (6), Acerba animi (7), Dilectissima Nobis (8), Nous avons fait entendre une solennelle protestation contre les persécutions déchaînées en Russie, au Mexique et en Espagne. On n'a pas encore oublié les allocutions que Nous prononcions l'an dernier, lors de l'inauguration de l'Exposition mondiale de la Presse catholique, dans l'audience accordée aux réfugiés espagnols et dans Notre message à l'occasion de la fête de Noël. Même les ennemis les plus acharnés de l'Église, qui dirigent de Moscou cette LUTTE CONTRE LA CIVILISATION CHRÉTIENNE, témoignent, par leurs attaques incessantes en paroles et en actes, que la Papauté continue fidèlement, encore de nos jours, à défendre le sanctuaire de la religion chrétienne et qu'elle a mis en garde contre le péril communiste plus souvent et d'une manière plus persuasive que n'importe quel autre pouvoir public de ce monde.
Nécessité d'un nouveau document solennel
6. Malgré ces avertissements paternels plusieurs fois renouvelés et qu'à Notre grande satisfaction Vous avez, Vénérables Frères, fidèlement communiqués et commentés à Vos fidèles, en plusieurs Lettres pastorales récentes, même en des Lettres collectives, malgré tout, propagé par d'habiles agitateurs, le danger va s'aggravant de jour en jour. C'est pourquoi, il est de Notre devoir, croyons-Nous, d'élever à nouveau la voix en un document plus solennel, selon l'habitude du Siège Apostolique, Maître de vérité; du reste, un pareil document répond au désir de tout l'univers catholique. L'écho de Notre voix, Nous en avons la ferme confiance, sera entendu partout où se trouvent des esprits libres de préjugés et des cœurs sincèrement désireux du bien de l'humanité; d'autant plus que Notre parole est aujourd'hui douloureusement confirmée par le spectacle des FRUITS AMERS PRODUITS PAR LES IDÉES SUBVERSIVES. Les effets que Nous avions prévus et annoncés se multiplient terriblement; ils se réalisent dans les pays déjà dominés par le communisme ou ils menacent tous les autres pays du monde.
7. Nous voulons donc encore une fois, dans une brève synthèse, exposer les principes du communisme athée, tels qu'ils se manifestent surtout dans le bolchevisme, et montrer ses méthodes d’action. À ces faux principes, Nous opposerons la lumineuse doctrine de l'Église, ,Nous indiquerons de nouveau, avec insistance, par quels moyens LA CIVILISATION CHRÉTIENNE, LA SEULE «CITÉ» VRAIMENT «HUMAINE», peut échapper à ce fléau satanique et se développer encore davantage pour le véritable bien-être de l'humanité.
II. DOCTRINE ET FRUITS DU COMMUNISME
La doctrine
Pseudo-idéal
8. Le communisme d'aujourd'hui, d'une manière plus accusée que d'autres mouvements semblables du passé, renferme une idée de fausse rédemption. Un pseudo-idéal de justice, d'égalité et de fraternité dans le travail, imprègne toute sa doctrine et toute son activité d'un certain faux mysticisme qui communique aux foules, séduites par de fallacieuses promesses, un élan et un enthousiasme contagieux, spécialement en un temps comme le nôtre, où par suite d'une mauvaise répartition des biens de ce monde règne une misère anormale. On vante même ce pseudo-idéal, comme s'il avait été le principe d'un certain progrès économique: quand il est réel, ce progrès s'explique par bien d'autres causes, comme l'intensification de la production industrielle dans des pays qui en étaient presque privés, la mise en valeur d'énormes richesses naturelles, l'emploi de méthodes brutales pour faire d'immenses travaux à peu de frais.
Matérialisme évolutionniste de Marx
9. La doctrine que le communisme cache sous des apparences parfois si séduisantes a aujourd'hui pour fondement les principes du matérialisme dialectique et historique déjà prônés par Marx; les théoriciens du bolchevisme prétendent en détenir l'unique interprétation authentique. Cette doctrine enseigne qu'il n'existe qu'une seule réalité, la matière, avec ses forces aveugles; la plante, l'animal, l'homme sont le résultat de son évolution. De même, la société humaine n'est pas autre chose qu'une apparence ou une forme de la matière qui évolue suivant ses lois; par une nécessité inéluctable elle tend, à travers un PERPÉTUEL CONFLIT DE FORCES, vers la synthèse finale: une société sans classes. Dans une telle doctrine, c'est évident, il n'y a plus de place pour l'idée de Dieu, il n'existe pas de différence entre l'esprit et la matière, ni entre l'âme et le corps: il n'y a pas de survivance de l'âme après la mort, et par conséquent nulle espérance d'une autre vie.
Insistant sur L'ASPECT DIALECTIQUE DE LEUR MATÉRIALISME, les communistes prétendent que le conflit, qui porte le monde vers la synthèse finale, peut être précipité grâce aux efforts humains. C'est pourquoi ils s'efforcent de rendre plus aigus les antagonismes qui surgissent entre les diverses classes de la société; la lutte des classes, avec ses haines et ses destructions, prend l'allure d'une croisade pour le progrès de l'humanité. Par contre, toutes les forces qui s'opposent à ces violences systématiques, quelle qu'en soit la nature, doivent être anéanties comme ennemies du genre humain.
Le sort de la personne humaine et de la famille
10. De plus, le communisme dépouille l'homme de sa liberté, principe spirituel de la conduite morale; il enlève à la personne humaine tout ce qui constitue sa dignité, tout ce qui s'oppose moralement à l'assaut des instincts aveugles. On ne reconnaît à l'individu, en face de la collectivité, aucun des droits naturels à la personne humaine; celle-ci, dans le communisme, n'est plus qu'un rouage du système. Dans les relations des hommes entre eux, on soutient le principe de l'égalité absolue, on rejette toute hiérarchie et toute autorité établie par Dieu, y compris l'autorité des parents. Tout ce qui existe de soi-disant autorité et subordination entre les hommes dérive de la collectivité comme de sa source première et unique. On n'accorde aux individus aucun droit de propriété sur les ressources naturelles ou sur les moyens de production, parce qu'ils sont l'origine d'autres biens, et que leur possession entraînerait la domination d'un homme sur l'autre. Voilà précisément pourquoi ce genre de propriété privée devra être radicalement détruit, comme la première source de l'esclavage économique.
11. En refusant à la vie humaine tout caractère sacré et spirituel, une telle doctrine fait nécessairement du mariage et de la famille une institution purement conventionnelle et civile, fruit d'un système économique déterminé. On nie par conséquent l'existence d'un lien matrimonial de nature juridico-morale qui soit soustrait au bon plaisir des individus ou de la collectivité et, par suite, on rejette l'indissolubilité de ce lien. En particulier, le communisme n'admet aucun lien spécial de la femme avec la famille et le foyer. En proclamant le principe de l’émancipation de la femme, il l'enlève à la vie domestique et au soin des enfants pour la jeter dans la vie publique et dans les travaux de la production collective au même titre que l'homme; le soin du foyer et des enfants est dévolu à la collectivité. Enfin on retire aux parents le droit de l'éducation, que l'on considère cO'mme un droit exclusif de la communauté; c'est seulement au nom de la communauté et par délégation que les parents peuvent encore l'exercer.
Ce que deviendrait la société
12. Que deviendrait donc la société humaine fondée sur de tels principes matérialistes? Elle serait une collectivité sans autre hiérarchie que celle du système économique. Elle aurait pour unique mission la production des biens par le travail collectif et pour unique fin la jouissance des biens terrestres dans un paradis où chacun «donnerait selon ses forces et recevrait selon ses besoins». C'est à la collectivité que le communisme reconnaît le droit ou plutôt le pouvoir discrétionnaire d'assujettir les individus au joug du travail collectif, sans égard à leur bien-être personnel, même contre leur propre volonté, et quand il le faut, par la violence. L'ordre moral aussi bien que l'ordre juridique ne serait plus, dès lors, qu'une émanation du système économique en vigueur; il ne serait fondé que sur des valeurs terrestres, changeantes et caduques. Bref, on prétend ouvrir une ère nouvelle, inaugurer une nouvelle civilisation résultant d'une évolution aveugle: «une humanité sans Dieu!»
13. Enfin quand l'idéal collectiviste sera devenu pour tous une réalité, au terme utopique de cette évolution, où la société ne connaîtra plus les différences de classe, l'État politique, aujourd'hui instrument de domination des capitalistes sur les prolétaires, perdra toute sa raison d'être et «disparaîtra ,de lui-même». Cependant, en attendant cet âge d'or, le communisme considère l'État et le pouvoir politique comme le moyen le plus efficace et le plus universel pour arriver à ses fins.
14. Vénérables Frères, voilà le nouvel Évangile que le communisme bolchevique et athée prétend annoncer au monde, comme un message de salut et de rédemption! Système rempli d'erreurs et de sophismes, opposé À LA RAISON COMME À LA RÉVÉLATION DIVINE; doctrine subversive de l'ordre social puisqu'elle en détruit les fondements mêmes, système qui méconnaît la véritable origine, la nature et la fin de l'État, ainsi que les droits de la personne humaine, sa dignité et sa liberté.
La diffusion
Promesses éblouissantes
15. Mais comment se fait-il qu'un tel système, depuis longtemps dépassé scientifiquement, et démenti par la réalité des faits, puisse se répandre aussi rapidement dans toutes les parties du monde? C'est que bien peu de personnes ont su pénétrer la vraie nature du communisme; le plus souvent on cède à la tentation, habilement présentée sous les plus éblouissantes promesses. Sous prétexte de ne vouloir que l'amélioration du sort des classes laborieuses, de supprimer les abus réels provoqués par l'économie libérale et d'obtenir une répartition plus équitable des richesses (objectifs parfaitement légitimes, sans aucun doute), en profitant de la crise économique mondiale, le communisme réussit à faire pénétrer son influence même dans les milieux sociaux où par principe on rejette le matérialisme et le terrorisme. Et comme toute erreur contient une part de vrai, cet aspect de la vérité, auquel Nous avons fait allusion, a été mis habilement en relief suivant les temps et les lieux pour cacher au besoin la brutalité repoussante et inhumaine des principes et des méthodes du communisme; on séduit ainsi des esprits distingués au point d'en faire à leur tour des apôtres auprès des jeunes intelligences trop peu averties pour découvrir les erreurs intrinsèques au système. Les fauteurs de communisme ne manquent pas non plus de mettre à profit LES ANTAGONISMES DE RACE, les divisions et les oppositions qui proviennent des différents systèmes politiques, enfin le désarroi qui règne dans le camp de la science séparée de Dieu, pour s'insinuer dans les Universités et appuyer les principes de leur doctrine sur des 'arguments pseudo-scientifiques.
Le libéralisme a frayé la voie au communisme
16. Pour comprendre comment le communisme a réussi à se faire accepter sans examen par les masses ouvrières, il faut se rappeler que les travailleurs étaient déjà préparés à cette propagande par l'abandon religieux et moral où ils furent laissés par l'économie libérale. Le système des équipes de travail ne leur donnait même plus le temps d'accomplir les devoirs religieux les plus importants, aux jours de fête; on ne s'est pas mis en peine de construire des églises à proximité des usines ni de faciliter la tâche du prêtre; au contraire, on a favorisé le laïcisme et continué son œuvre. ON RECUEILLE DONC L'HÉRITAGE DES ERREURS tant de fois dénoncées par Nos Prédécesseurs et par Nous-même; il n'y 'a pas à s'étonner qu'en un monde déjà largement déchristianisé se propage l'erreur communiste.
Propagande insidieuse et étendue
17. De plus, la diffusion si rapide des idées communistes, qui s'infiltrent dans tous les pays grands et petits, civilisés ou moins développés, au point qu'aucune partie du monde n'y échappe, cette diffusion s'explique par une propagande vraiment diabolique, telle que le monde n'en a peut-être jamais vue: propagande dirigée par un centre unique et qui S'ADAPTE TRÈS HABILEMENT AUX CONDITIONS DES DIFFÉRENTS PEUPLES; propagande qui dispose de grands moyens financiers, d'organisations gigantesques, de Congrès internationaux, de forces nombreuses et bien disciplinées; propagande qui se fait par des tracts et des revues, par le cinéma, le théâtre et la radio, dans les écoles et même dans les Universités, qui envahit peu à peu tous les milieux même les meilleurs, si bien que le poison pénètre presque insensiblement et toujours davantage les esprits et les cœurs.
Conjuration du silence dans la presse
18. Un troisième facteur contribue largement à la diffusion du communisme, c'est la conjuration du silence dans une grande partie de la presse mondiale non catholique. Nous disons conjuration, car on ne saurait expliquer autrement le fait qu'une presse aussi avide de commenter les menus incidents de la vie quotidienne ait pu si longtemps garder le silence au sujet des horreurs commises en Russie, au Mexique et dans une grande partie de l'Espagne, qu'elle parle relativement peu d'une organisation mondiale aussi vaste que le communisme dirigé par Moscou. Cette conjuration est due en partie à des raisons inspirées par une politique à courte vue; elle est favorisée par diverses organisations secrètes, qui depuis longtemps cherchent à détruire l'ordre social chrétien.
Conséquences douloureuses
Russie et Mexique
19. Cependant les douloureux effets de cette propagande sont sous nos yeux. Là où le communisme a pu s'affirmer et dominer - et ici Nous songeons avec une particulière affection paternelle aux peuples de la Russie et du Mexique - il s'est efforcé par tous les moyens de DÉTRUIRE (et il le proclame ouvertement) LA CIVILISATION ET LA RELIGION CHRÉTIENNES jusque dans leurs fondements, d'en effacer tout souvenir du cœur des hommes, spécialement de la jeunesse. Evêques et prêtres ont été bannis, condamnés aux travaux forcés, fusillés et mis à mort de façon inhumaine; de simples laïques, pour avoir défendu la religion, ont été suspectés, malmenés, poursuivis et traînés en prison et devant les tribunaux.
Horreurs du communisme en Espagne
20. Et là où, comme en Notre chère Espagne, le fléau communiste n'avait pas eu le temps encore de faire sentir tous les effets de ses théories, il s'est déchaîné, hélas! avec une violence plus furieuse. Ce n'est pas l'une ou l'autre église, tel ou tel couvent qu'on a abattus, mais quand ce fut possible, ce sont toutes les églises et tous les couvents et toute trace de la religion chrétienne qu'on a voulu détruire, même quand il s'agissait des monuments les plus remarquables de l'art et de la science! La fureur communiste ne s'est pas contentée de tuer des évêques et des milliers de prêtres, de religieux et de religieuses, s'en prenant plus particulièrement à ceux et à celles qui justement s'occupaient avec plus de zèle des ouvriers et des pauvres, mais elle fit un nombre beaucoup plus grand de victimes parmi les laïcs de toute classe, qui, encore maintenant, chaque jour, peut-on dire, sont massacrés en masse pour le seul fait d'être bons chrétiens ou du moins opposés à L'ATHÉISME COMMUNISTE. Et cette épouvantable destruction est perpétrée avec une haine, une barbarie, une sauvagerie qu'on n'aurait pas cru possibles en notre temps. Aucun particulier de jugement sain, aucun homme d'État, conscient de sa responsabilité, ne peut, sans frémir d'horreur, penser que les événements d'Espagne pourraient se répéter demain en d'autres nations civilisées.
Fruits naturels du système
21. Or, on ne peut dire que de telles atrocités soient de ces phénomènes passagers qui accompagnent d'ordinaire toute grande révolution, des excès isolés d'exaspération comme il s'en trouve dans toutes les guerres; non, ce sont les fruits naturels d'un système qui est dépourvu de tout frein intérieur. Un frein est nécessaire à l'homme pris individuellement comme à l'homme vivant en société. Même les peuples barbares trouvèrent ce frein dans la loi naturelle gravée par Dieu dans l'âme humaine. Et quand cette loi naturelle fut mieux observée, on vit des nations anciennes monter à un niveau de grandeur qui étonne encore, plus qu'il ne conviendrait, des observateurs superficiels de l'histoire. Mais lorsque du cœur des hommes l'idée même de Dieu s'efface, leurs passions débridées les poussent à la barbarie la plus sauvage.
Lutte contre tout ce qui est divin
22. C'est, hélas! le spectacle qui s'offre à nous: pour la première fois dans l'histoire nous assistons à une lutte froidement voulue et savamment préparée de l'homme contre «tout ce qui est divin» (9). Le communisme est par sa nature antireligieux et considère la religion comme «l'opium du peuple», parce que les principes religieux qui parlent de fa vie d'outre-tombe empêchent le prolétaire de poursuivre la réalisation du paradis soviétique, qui est de cette terre.
Le terrorisme
23. Mais on ne foule pas aux pieds impunément la loi naturelle et son Auteur: le communisme n'a pu et ne pourra réaliser son but, pas même sur le plan purement économique. Il est vrai qu'en Russie il a contribué à secouer hommes et choses d'une longue et séculaire inertie et à obtenir par des moyens souvent sans scrupules quelque succès matériel; mais nous savons par des témoignages non suspects, dont certains sont récents, que de fait, ce qu'il s'était promis, il ne l'a pas atteint; sans compter l'esclavage que le terrorisme a imposé à des millions d'hommes. MÊME SUR LE TERRAIN ÉCONOMIQUE, ON NE PEUT SE PASSER DE LA MORALE, du sentiment moral de la responsabilité, pour lequel il n'y a pas de place dans un système aussi matérialiste que le communisme. Pour en tenir lieu, il n'y a que le terrorisme, tel que précisément nous le voyons maintenant en Russie, où les anciens camarades de conspiration et de lutte se détruisent les uns les autres; un terrorisme qui, au demeurant, ne réussit pas à endiguer la corruption morale ni même à empêcher la désorganisation de la structure sociale.
Une pensée paternelle pour les peuples opprimés en Russie
24. En parlant ainsi, Nous ne voulons aucunement condamner en masse les peuples de l'Union Soviétique, auxquels Nous portons une affection paternelle. Nous savons que beaucoup d'entre eux gémissent sous le joug qui leur est imposé de force par des hommes souvent étrangers aux véritables intérêts du pays, et Nous reconnaissons que beaucoup d'autres ont été trompés par des espérances fallacieuses. Ce que Nous accusons, c'est le système, ses auteurs et ses fauteurs, qui ont considéré la Russie comme un terrain plus propice pour faire l'expérience d'une théorie élaborée depuis des dizaines d'années, et qui de là continuent à la propager dans le monde entier.
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Notes:
(*) Les titres et sou3-titres appartiennent au texte officiel.
(1) Lettre Encycl. Qui pluribus, 9 nov. 1846 (Acta Pii IX, vol. I, p. 13). Cf. Syllabus, § IV (A. S. S., vol. III, p. 170).
(2) Lettre Encycl. Quod Apostolici muneris, 28 déc. 1878 (Acta Leonis XIII, vol. I, p. (6).
(3) 18 déc. 1924 : A. A. S., vol. XVI (1924), pp. 494, 495.
(4) 8 mai 1928 : A. A. S., vol. XX (1928), pp. 165-178.
(5) 15 mai 1931 : A. A. S., vol. XXIII (1931), pp. 177-228.
(6) 3 mai 1932: A. A. S., vol. XXIV (1932), pp. 177-194.
(7) 29 sept. 1932 : A. A. S., vol. XXIV (1932), pp. 321-332.
(8) 3 juin 1933 : A. A. S., vol. XXV (1933), pp. 261-274.
(9) Cf. II Thessal., II, 4.