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Les Relations des Jésuites contiennent 6 tomes et défont le mythe du bon Sauvage de Jean-Jacques Rousseau, et aussi des légendes indiennes pour réclamer des territoires, ainsi que la fameuse «spiritualité amérindienne».

samedi, août 16, 2008

DESIDERATUM

Chose dont on regrette l’absence.

Ce qui reste à trouver, à résoudre: la paix est le desideratum du progrès.

Toute science a ses desiderata...






L'EUROPE

En cette matière délicate, nous voulons nous en tenir surtout à des textes, c'est-à-dire à des principes énoncés qui donnent un fil directeur à travers une politique en pleine évolution, évolution d'autant plus active que l'Algérie française étant liquidée, la question européenne devait logiquement et chronologiquement prendre son tour après l'abandon de nos colonies.

Il faut aussi dire notre point de vue sur l'Europe. En effet, ne pas partager sur l'Europe les vues qu'on nous propose comme unique moyen de salut, en un mot, celles de tous les Fédéralistes divergents, des planétaires convergents, de MM. Spaak, Beveridge ou de Gaulle c'est, paraît-il, verser dans le passéisme, manquer le train de l'histoire, ne rien comprendre à l'interdépendance, croupir dans le patriotisme à papa. Ne pas être Européen sous vide absolu, c'est un gros péché aux yeux de catholiques d'aujourd'hui qui, faute de pouvoir traduire la doctrine de l'Église en mondialisme humanitaire, se canonisent eux-mêmes vierges et martyrs pour la cause d'un pacifisme agressif.

De quelle Europe s'agit-il? Il Y eut une Europe autrefois; c'est la Réforme qui l'a brisée; voilà, pour l'histoire. Quant aux principes, Pie XII a dit l'essentiel.


Nous ne voulons pas plus être dupes des intentions délibérément anti-catholiques des uns que naïfs avec les autres. Ceci dit, nous n'en sommes pas moins européens.


L'EUROPE FÉDÉRALISTE DE SAINT-YVES D'ALVEYDRE

Les idées européennes actuelles sont en majeure partie sorties des ouvrages de ce Grand Initié comme l'appelle M. J. Weis dans sa préface à la Mission des Juifs. Leur réédition depuis 1946 connaît une vogue qu'ils n'eurent pas du temps de l'auteur. Cependant, on nomme rarement Saint-Yves d'Alveydre quand on traite publiquement de l'Europe. On affecte parfois même de le récuser. Son Kabbalisme rosicrucien, sa Théocratie synarchique gênent évidemment la propagande, mais on s'en nourrit comme d'un maître, on le révère comme un prophète qu'il n'a pas été puisqu'il n'a fait que mettre en forme désoccultée des projets longtemps mûris dans les hautes sociétés secrètes.

Pour essayer d'être clair, nous allons d'abord exposer l'européanisme de Saint-Yves d'Alveydre sans référence à des considérations historiques que l'on trouvera plus loin. Laissons-le parler:

Voici en procédant hiérarchiquement, l'ordre et le nom des organes à constituer pour fonder le gouvernement général de l'Europe...
1. - Le Conseil européen des Églises nationales.
2. - Le Conseil européen des États nationaux.
3. - Le Conseil européen des Communes nationales.

(Mission des Souverains, p. 417)

D'après Saint-Yves:

Le premier conseil doit représenter la vie religieuse et intellectuelle, c'est-à-dire la Sagesse et la Science;

Le deuxième conseil doit représenter la vie politique et juridique, c'est-à-dire l'équité et la Justice;

Le troisième conseil doit représenter la vie économique, c'est-à-dire la Civilisation et le Travail.

À la Synarchie européenne ainsi constituée, correspond au sein de chaque nation, les mêmes organes; c'est ce que l'auteur appelle les Synarchies nationales. La première remarque à faire sur ces textes sera la constatation que dans la hiérarchie des valeurs ce sont les Églises nationales qui viennent en tête. Les Églises nationales doivent syncrétiser tous les courants religieux et intellectuels quels qu'ils soient: pluralisme absolument laïque, excluant par là même tout droit de priorité et de primauté de l'Église catholique.

Voilà le premier principe synarchique. Nous y reviendrons. En second lieu nous constaterons encore que cinquante ans plus tard, le Pacte Synarchique reprendra sous le nom d'Ordres divers: culturel, politique, social-économique, la même hiérarchie à tous les échelons nationaux, impériaux, mondial.

Mais pour l'édification du Système, toujours d'après Saint-Yves, il faudra commencer dans l'ordre inverse. Ce sera l'ordre chronologique. Dira-t-on que l'auteur des Missions, le porte-parole des hautes instances secrètes n'est pas écouté, qu'il est dépassé, inactuel, renié, étranger à ce vaste mouvement de fraternité européenne poursuivant sa marche sous la houlette des Coudenhove-Kalergi, Monnet, Spaak et tant d'autres? Eh bien! à soixante-dix ans de distance, le conseil a été scrupuleusement suivi. On a commencé par la communauté économique européenne amorcée par la C.E.C.A. (charbon-acier). Lorsqu'en juillet 1960, Coudenhove-Kalergi écrira au Général de Gaulle que l'heure est arrivée de passer de l'économique à la communauté politique, celui-ci, bien d'accord, ne tardera pas à se mettre au travail mais avec un retard, qu'explique l'affaire d'Algérie. Nous sommes certains que si un jour vient l'heure de l'Église nationale,. qui d'ailleurs est en marche dans les conseils secrets du Régime, le conformisme culturel des catholiques français s'effondrera au cri de: «Nous n'avions pas voulu cela.»

Reprenons donc le système dans l'ordre des réalisations c'est-à-dire dans l'ordre inverse.

1. - Conseil européen des Communes.

Ce sont les capitales Londres, Paris, Bruxelles qu'il s'agit d'associer dans un conseil européen en prenant la vie économique comme base, seul moyen de les lier à la vie publique et de les rendre à leur véritable rôle national comme universel.
(Mission des Souverains - p, 418.)

Les conférences de Bruxelles auront fait assez de bruit pour qu'on se souvienne de ce texte de 1882.

On pourra ici admirer la civilisation nouvelle que l'on veut fonder sur le primat de l'économie, civilisation ayant pour assise première la puissance des richesses matérielles avec leurs contraintes asservissant l'homme. Il n'est pas difficile de comprendre, dès lors, comment les

états où le commerce constitué comme l'un des mobiles du gouvernement en fait la principale force (Fabre d'Olivet)

peuvent enserrer fatalement l'individu dans un cadre social technocratisé auquel ne s'attache aucun nom, aucune responsabilité, supprimant ainsi tout recours de cet individu et toute indépendance gouvernementale, permettant derrière cet anonymat de cacher un gouvernement invisible. L'occultiste Fabre d'Olivet, maître de Saint-Yves d'Alveydre, avait en profond mépris cette emporocratie; il la décrivait exerçant sa puissance dans des républiques sans liberté, dans des monarchies avec des rois sans autorité, dans des nations sans aristocratie sinon celle de la servilité. Mais il reconnaissait en elle:


le ressort physique qui, dans tous les gouvernements emporocratiques, tient la place des principes intellectuels qui y manquent.
(Vues sur l'histoire du genre humain - 1822)

En effet, quelles possibilités indéfinies n'offre-t-elle pas au régime synarchique où, précisément, le Pouvoir public, comme on le verra, ne possède pas l'Autorité, où le pouvoir du chef de l'État n'est pas, ne doit pas être l'autorité (occulte) qui dirige la nation? Car c'est un principe absolu formulé aussi bien chez Saint-Yves d'Alveydre que dans le schéma de l'Archétype social. C'est ainsi que dans la logique des choses la puissance financière apatride et celle des sociétés secrètes trouvent la raison de leur alliance et qu'en fait, quoi qu'on en dise, leur action se conjugue.


Ces intérêts économiques sont aujourd'hui la base réelle de toutes les sociétés nationales et nulles, politiques soit intérieure, soit étrangère, ne devrait pouvoir s'exercer sans les consulter et en recevoir une sage et précise pondération.
(Mission des Souverains - p. 418)


C'est dans la vie économique et emporocratique de vos peuples que vous devez chercher la base précise, les fondements exacts de l'édifice européen que je vous invite à construire dans votre intérêt comme dans celui des nations.
(Mission des Souverains - p. 423)


Le Conseil économique européen se composera, d'après l'auteur, de financiers, d'industriels, d'agriculteurs, de représentants de Syndicats. Il traitera des questions financières, bancaires, commerciales, industrielles et agricoles. Ses membres seront les "Juges ". Il n'est pas inutile de rappeler ici notre précédent chapitre sur les "Conciles secrets" qui se réunissent périodiquement dans des villes différentes. On trouvera sans doute dans la réunion Bilderbergers de 1965 des noms bien connus, mais en se souvenant que les maîtres du jeu se nomment Rotschild, Rockfeller, Warbourg, Sulzberger, etc...


2. - Le Conseil des États.

C'est le fédéralisme européen. Le Pacte synarchique ne dira pas autre chose ni plus tard encore le Comte de Coudenhove-Kalergi, ni le président de Gaulle et M. Adenauher qui veulent fédérer les États ou leurs gouvernements. Ce que l'on doit ici retenir c'est que la construction politique doit suivre l'édification de la Communauté économique.



La vie économique vous donnera la base, mais sur cette base vous devrez élever le Conseil des Etats européens.
(Mission des Souverains - p. 425)


3. - Le Conseil des Églises.

C'est le plus important, c'est le suprême sommet de l'édifice; il comprend deux parties:
- le Conseil visible, ensemble syncrétiste des religions, universités, institutions culturelles,
- et le noyau initiatique supervisant le reste.

Sur le plan mondial, c'est la Théocratie ou Contre-Église. Elle fait l'objet de la seconde partie de cette étude.


LE PACTE SYNARCHIQUE ET LE FÉDÉRALISME

C'est maintenant qu'il nous faut mettre sous les yeux du lecteur les principaux articles du Pacte synarchique qui, répétons-le, se place vers 1935. Mais auparavant, il nous faut montrer, afin qu'on en retire une certitude indispensable par quelques traits antérieurs à cette date, que ce texte procède bien, non seulement d'une tradition ésotérique, mais 'd'une volonté des sociétés secrètes.

Sans doute, il y a fédéralisme et Fédéralisme. Un système fédéral n'a rien en soi de contraire à la raison ni à l'honnêteté; une fédération peut prendre place parmi les régimes les plus justifiés; c'est un instrument juridique légitime susceptible d'ailleurs d'une foule de modalités. Mais le Fédéralisme internation de l' "Ordre kaballistique de la Rose-Croix" et du martinisme exposé par Saint-Yves d'Alveydre n'est que le voile d'une Théocratie, reprise du martinisme classique. C'est de celui-là que la basse-maçonnerie universelle s'est emparée sans que pour autant ses adeptes s'en soient tous aperçus. Le Frère-Maçon Gaston Moch écrivait dans son livre La garantie de la S.D.N. (P. 8 et 10) que la France et ses alliés:



veulent donner au monde une organisation égalitaire, fédéraliste, libertiste.

Dès 1917, dans American Freemason de juin-juillet (p. 304) le Frère-Maçon Morcombe disait:

Ce ne sera pas la grande Mittel-Europa qui donnera l'inspiration et l'exemple du plan démocratique des peuples, des États-Unis du monde, de la Fédération Mondiale prédite par le poète lauréat du règne de Victoria; elle sera établie sur la large base des volontés et des consciences des nations.

La Mittel-Europa dont parle le Frère-Maçon Morcombe c'était la politique des Hohenzollern déchus à laquelle on substituera la politique du Rideau de Fer, une des plus déchirantes du drame mondial. Car le Frère-Maçon Morcombe n'était pas un petit maçon... Pour le reste de sa citation, nous noterons qu'il entendait bien lui aussi, mais à l'échelle mondiale, ce singulier fédéralisme synarchique repris par Coudenhove-Kalergi.

Ce n'est pas par hasard, en effet, qu'en 1927 le Collège libre des Sciences sociales à Paris donnait sur le fédéralisme une suite de cours-conférences professés par le Frère-Maçon Nitti, ancien président du Conseil des ministres italiens, et par Milioukov, martiniste notoire et agissant à la cour de Russie, ancien ministre des Affaires étrangères, ouvrier de la chute du Czar, de la révolution de mars 1917 et, par surcroît, ami de Jacob Schiff, financier de ladite Révolution bolchevique. Papus avait raison, la haute finance et la haute maçonnerie se donnent la main, nous ne cesserons de le dire et de le prouver.

Ces conférences avaient pour couverture l'innocente présidence d'Hennessy, ambassadeur de France à Berne; la courtoisie diplomatique ne perd pas ses droits, M. de Coudenhove-Kalergi sait l'observer. Ce qui ne l'a pas empêché, dans une conférence à l'Académie des Sciences morales et politiques le 15 avril 1960, de ressasser devant un auditoire savant, dont on ne nous dit pas s'il a souri ou protesté, les élucubrations historiques de Saint-Yves d'Alveydre - sans le nommer - en un véritable plagiat. Il n'est donc pas sans connaître et l'occultisme de Fabre d'Olivet et la "Théocratie" martiniste, car nous ne voulons pas le prendre pour un niais. Il sait certainement ce qu'il avance quand, reprenant presque textuellement une phrase de Saint-Yves, il dit:
La chute de l'Empire des Papes a permis la naissance de l'idée d'une fédération européenne laïque.

C'est du XVe siècle dont il parle, il est vrai, tandis que Saint-Yves parle du XIXe siècle, mais des allusions répétées à Cavour ne nous laissent aucun doute sur son savoir... profond.

D'autre part, déjà en 1934, après l'insurrection du 6 février, un manifeste paru sous la direction de Jules Romains faisait pressentir le contenu du Pacte synarchique. C'était le "Plan du 9 juillet 1934" dont certains signataires se trouvent aujourd'hui mêlés à la politique.

Le Pacte, lui, se pose et reste comme la charte, le guide dont on s'inspire au gré des circonstances pour arriver à un but soustrait par les hautes sociétés secrètes aux vicissitudes de l'activité politique; en voici les principaux articles:

Article 581:
Dans ce sens, l'Empire synarchique français est voulu par nous comme le facteur primordial de l'Union Fédérative de l'Europe.

Article 582:
L'Union européenne doit sortir tôt ou tard d'un juste équilibre et d'une conjugaison synarchique des poussées impériales:
-française, britannique, romaine, germanique et slave, en jeu dans l'Europe actuelle.

Article 586:
L'Empire synarchique français est d'ores et déjà voulu par nous comme le promoteur de la Pan-Eurafrique,
-la future union fédérative des peuples, des états et des nations libérés de l'Europe et de l'Afrique.

Article 588:
La Pan-Eurafrique doit être le cadre grandiose de la civilisation occidentale rénovée et magnifiée, -le champ commun de son exaltation culturelle et de sa volonté de puissance.
-l'idéal médiateur de la paix occidentale.



DIFFICULTÉS

Ici, mentionnons un événement historique considérable: Hitler, le nazisme, l'Allemagne hitlérienne, la guerre de 1940. Coup d'arrêt, non pas fortuit dans l'application du programme, mais opposition classique des sociétés secrètes nationales et antijuives au groupe judéo-anglo-saxon dans la grande synarchie, jugée hégémonique: c'est la guerre. Mais les oppositions de groupe n'enlèvent rien à une unité supérieure.

Ce qui nous occupe présentement, ce sont les contradictions internes du plan synarchique en ce qui concerne le découpage de la planète. Elles sont à la base des guerres froides. Parlons des thèses: États-Unis d'Europe et Fédéralisme européen.


ÉTATS-UNIS D'EUROPE ET FÉDÉRALISME EUROPÉEN

D'une façon générale, la thèse États-Unis d'Europe se rapporte à un seul et unique gouvernement étendant son pouvoir sur toutes les nations européennes transformées en grandes provinces.

Le Fédéralisme européen en tient généralement pour un gouvernement qui ne serait que l'émanation des gouvernements divers de chaque nation subsistant avec une constitution propre. Il aurait des pouvoirs plus restreints selon des modalités diverses: Europe des patries. Europe des nations. Le Général de Gaulle a émis sur ce point des opinions impériales où la manœuvre diplomatique a sa part évidemment et qui ont, comme on sait, la vertu de provoquer des remous dont les ondes traversent l'Océan.

Précisément cette divergence n'est pas d'origine spécifiquement européenne. La thèse États-Unis d'Europe est d'origine américaine. Si l'on voit là-bas, comme partout ailleurs, le Gouvernement mondial sous la forme d'une fédération de cinq (ou huit, ou quinze) divisions du monde, on conçoit l'organisation interne de chacune d'elles à l'image des États-Unis et parfois avec le secret espoir de voir ceux-ci garder leur prépondérance au milieu du globalisme universel.

Chose très importante: LA DIVERGENCE N'EST PAS NOUVELLE; elle ne nous est pas contemporaine comme on le croit. Elle se manifeste à l'origine même de la Synarchie moderne au sein des hautes instances secrètes.

Écoutons sur ce point Saint-Yves d'Alveydre:

Les États-Unis d'Europe sont-ils ce desideratum? Pour les américains: Oui. Pour les Européens: Non. Ce serait une singulière méthode de conciliation que de proposer aux souverains cette abdication qui du reste n'avancerait pas la question. Les États-généraux d'Europe synarchiquement constitués répondent seuls au desideratum qui nous est posé.

La loi sociale dont ils sont la forme appartient à la révélation, au livre saint de toutes les églises du monde comme à la Science historique pure et simple.
(Jeanne d'Arc victorieuse - p. 8 -1890)


Ainsi, la divergence prend date. On la saisit sur le vif à son origine. Notons par surcroît la référence à la révélation, c'est-à-dire à une tradition ésotérique ou à quelques sacristains de la Théurgie... Une fois de plus...

Quarante ans après nous constatons la même divergence.

Voici un texte très important à plusieurs points de vue. C'est une page de Kadmi-Cohen tirée de son livre: L'abomination américaine (1930). Nous ajouterons ensuite les commentaires indispensables car c'est un TEXTE-CLEF (2):

Les États-Unis d'Europe sont une création prématurée venant au monde sous le coup de fouet américain, sous la menace de la vassalité yankee; ils ne seraient guère viables. Il suffirait que l'étreinte se desserrât pour que des luttes intestines reprissent. Il faut penser non pas aux États-Unis mais à la Fédération des pays européens.

Union politique? Non, mais action économique concertée. Entre qui? Comment commencer? Mille questions qu'il faut aborder à la fois, qu'il faut résoudre simultanément.

Il faut quelqu'un qui prenne l'initiative: UN HOMME D'TAT INSPIRÉ sans être illuminé qui croie à une mission supérieure à lui dévolue et une nation assez puissante, assez libre dans ses mouvements, assez généreuse dans ses inspirations, assez pondérée et assez équilibrée dans son esprit, assez calme et assez confiante dans ses forces pour rallier â elle le troupeau des nations européennes.

L'Angleterre ne peut assumer ce rôle...

L'Angleterre, quelles que soient les déclarations officielles de ses successifs représentants, soutient au fond de son cœur la constitution du bloc européen et se réserve d'y adhérer à la dernière minute. Elle n'y collabore pas ouvertement, directement, activement.

LA FRANCE PEUT LE FAIRE. Elle a commencé déjà. Son œcuménisme s'est traduit dans la politique de paix de Briand (3).
(pp. 265 à 267)


Voici maintenant, en sens contraire, l'article d'un auteur américain Clarence Streit; on le tient aux États-Unis pour une sorte de théoricien autorisé du mondialisme. On y verra que Clarence Streit ne propose rien de moins qu'une fédération atlantique (et non pas une Europe fédérale indépendante) calquée sur celle des États-Unis, proposition qui serait débattue par des délégués des diverses nations, en dehors de leurs propres gouvernements... On y décèlera, in fine, le panaméricanisme latent qui suscitait la déjà lointaine opposition de Saint-Yves d'Alyeydre et suscite aujourd'hui celle du Général de Gaulle. Voyons donc comment Clarence Streit propose une conférence pan-atlantique:

La "conférence extraordinaire" envisagée se situerait à peu près à mi-chemin d'une réunion diplomatique et d'un congrès non officiel. Les délégués seraient nommés officiellement. Ils ne seraient pas toutefois comme des diplomates, aux ordres de leur gouvernement, mais bien libres de parler et de voter, conformément à leur expérience individuelle et à leur conscience. Le but à
atteindre est que les délégués ne votent pas par blocs nationaux, mais que chaque idée soumise à la conférence puisse compter des partisans dans les diverses délégations. Au lieu de la division habituelle par nation, la
conférence pourrait amener une division des délégués entre les thèses fonctionnaliste et fédéraliste..........
"Toujours réaliste, cette solution éviterait l'égalité fictive d'une conférence diplomatique dans laquelle le vote
unique assigné à chaque délégation équivaut à donner à un citoyen portugais le même poids qu'à quatre citoyen français et à un citoyen anglais la valeur de trois citoyens américains. Le nombre des délégués de chaque pays serait proportionnel grosso modo au chiffre de sa population. et le vote serait à la majorité simple, toutes les précautions ayant été prises cependant pour éviter
la domination des petits pays par les plus grands.

Aux sceptiques, nous répondrons que cette procédure a déjà obtenu de remarquables succès. Elle est
conforme au modèle de la convention fédérale qui se réunit à Philadelphie en 1787. Son résultat fut la rédaction puis l'adoption par les treize Etats souverains d'une Constitution qui, en dépit de ses imperfections, remplaça leur alliance par une union fédérale et amena les États-Unis à leur forme présente. On doit reconnal1re que le succès de cette convention fédérale de 1787 est dû en
grande partie au fait que les délégués, bien que nommés officiellement, agissaient sans directives de leur gouvernement et étaient libres de voter selon leur conscience.

Mais, dira-t-on, ceux qui ont l'habitude du pouvoir et qui
sont accoutumés à diriger eux-mêmes leur politique regarderaient d'un mauvais œil l'idée de nommer à une conférence des délégués libres d'agir individuellement. Sans doute ce sacrifice demande aux hommes d'état une certaine largeur d'esprit. Mais ne vaut-il pas la peine d'être fait devant un problème exceptionnel que les méthodes ordinaires n'ont jamais pu résoudre?

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Cette conférence étant calquée sur celle qui créa leur propre Constitution, les Américains prévoient qu'elle recommanderait la création d'une union fédérale atlantique et qu'il leur serait difficile de la répudier sans répudier en même temps le chapitre de leur
histoire dont ils sont le plus fiers. Aussi n'est-il pas surprenant que les hommes au pouvoir dans le plus puissant pays démocratique, au moment où ils
s'apercevaient qu'ils risquaient de perdre personnellement bien plus de pouvoirs
que leurs collègues d'autres pays aient hésité si longtemps à prendre la route de l'union de l'Atlantique.
"À partir du moment où le Congrès américain
prendrait la décision dc'inviter les autres démocraties à explorer ~ 'dvenir de la fédération atlantique par le moyen de cette conférence extraordinaire. il serait tragique de voir les pays invités ne pas comprendre la signification
profonde de cette offre et ne pas apprécier les énormes avantages de cette manière nouvelle d'essayer de résoudre le problème fondamental qui se pose aux
nations occidentales.

(Le Monde - 4 sentembre 1959.)


En sens contraire, Coudenhove-Kalergi n'a pas varié, malgré, en 1955, quelques hésitations provoquées par les circonstances.

On ne s'entend pas toujours, assurément, dans la maison, mais le Frère-Maçon René Guénon nous dirait à juste titre que les différends font partie du système de balanciers qui font progresser l'ensemble vers le but final.


PAN-EURAFRIQUE OU ÉTATS-UNIS D'EUROPE?

Le complexe Pan-Eurafrique est, depuis 1935, le rêve des synarques classiques européens. Référons-nous au Pacte synarchique article no. 592; on y voit parmi les cinq divisions du monde:
- la société mineure des nations britanniques,
- la société mineure des nations pan-eurafricaines.


La Pan-Eurafrique signifie que l'Europe unifiée exploitera le territoire africain en accord avec les "nations ... libérées d'Afrique" (Pacte syn. art. no. 585), toutes unies dans une vaste confédération. Les "nations libérées d'Afrique"? Y compris l'Algérie? Oui et nous espérons que le lecteur aura compris puisque c'est fait. Actuellement l'Afrique compte trente-huit états indépendants. On aura également compris que, depuis cette libération africaine, le problème n'est pas un mince sujet de difficultés, non seulement sur le forum mais dans le réduit des Hautes Sociétés secrètes qui ont maintenant à compter avec les moyens à mettre en œuvre et surtout avec de féroces compétitions où les ambitions américaines, soviétiques et même chinoises ont joué à plein.

Quant au Commonwealth, il était réservé, mis à part par le texte du Pacte synarchique. Coudenhove-Kalergi dira lui-même qu'au départ (1935) les plans tirés étaient favorables à l'Angleterre.

... Telle est la thèse eurafricaine. Elle a, pour le moment, subi un retentissant échec dans les faits.

Mais la thèse États-Unis d'Europe, soutenue par l'Amérique, postule en sens contraire:
- l'appartenance du Canada à la Pan-Amérique et
- l'indépendance de l'Afrique du Sud pour faire de l'Afrique un continent séparé, convoité par l'économie américaine menacée par l'existence des possessions eurasiennes de l'U.R.S.S. et la Pan-Asie (où, il faut le dire, les U.S.A. n'ont pas bonne presse). Une lettre d'Edgard Hoover à Curtiss en 1957 révèle ce problème; on en lira des extraits à notre chapitre sur le Général de Gaulle.


Pour l'Angleterre donc, son adhésion pure et simple à des États-Unis d'Europe pourrait être la mort du Commonwealth. C'est pourquoi on constatait il y a quelques années, de l'autre côté de la Manche, une majorité de fédéralistes plutôt favorables aux cinq propositions du Pacte synarchique.

Devant ces problèmes, la crise est ouverte. L'Afrique du Sud est en sécession et les États-Unis y jouent leur jeu. Qui gagnera finalement?


LA CRISE

Tout dépend donc de la construction de l'Europe avec ou sans l'Angleterre.
Nous pourrions par une série de textes remontant à une dizaine d'années montrer le développement de cette affaire et ses conséquences possibles. Mais, bien que nous nous proposions ici de faire œuvre de documentation, la brièveté de cette étude ne nous permettra que de les signaler au passage.

On a donc d'abord, très régulièrement, et sans l'Angleterre abordé la construction de l'Europe en commençant, selon la règle donnée par Saint-Yves d'Alveydre, par l'organisation économique. Nous sommes en 1951. Voici une déclaration strictement synarchique faite au Conseil de l'Europe des Six à Strasbourg, le 6 mars 1953, par H. Heinrich von Brentano, ministre de Bonn.

La mission reçue des six ministres des Affaires étrangères et l'acceptation d'une tâche que nous conduisons maintenant à sa fin provisoire constituent une sorte de révolution silencieuse; l'opinion publique s'est bien aperçue de ce travail sans toutefois en saisir la portée.


Révolution silencieuse? Le pacte synarchique dit: révolution invisible. Fin provisoire? Le pacte dit:
période préparatoire nécessitant une action
secrète menée avec une inflexible patience.

La mise en œuvre de ce plan européen n'allait que faire grandir les difficultés au sein du système synarchique général tel qu'il est exposé dans ce présent chapitre et au chapitre Les cinq divisions du Monde.

En effet, en 1955, devant ces difficultés, Coudenhove-Kalergi ne voyait d'autre solution que la reprise du plan Reynaud au moment de l'invasion allemande (4), mais du plan Reynaud élargi: intégration de l'Europe dans un Commonwealth... anglo-européen. Tout l'article de Coudenhove-Kalergi dans le Figaro du 10 mars 1955 serait à citer.
Huit ans de déception nous ont appris la triste vérité qu'une Fédérationeuropéenne n'est possible ni avec l'Angleterre ni sans elle.

Coudenhove-Kalergi brandit alors l'épouvantail de l'Allemagne glissant vers la Russie. Or, affirmons-le une fois de plus, en 1955 et même en 1957, la Russie soviétique était parfaitement incapable de tenir si la Haute Maçonnerie Universelle, usant des puissances anglo-saxonnes et de l'intoxication du public, n'avait considéré le Rideau de Fer comme intangible et fait passer la supériorité soviétique pour une réalité. L'affaire de Suez a été arrêtée, non par les menaces russes mais par les États-Unis. Exactement la même politique qu'en Orient vis-à-vis de Tchang Kaï Cheik au profit du communisme chinois.

Ce que Coudenhove-Kalergi ne disait pas en 1955, c'est qu'en réalité l'Angleterre considérée avec son Commonwealth par le pacte synarchique de 1935 comme une des cinq divisions du monde, glissait de plus en plus, après la perte des Indes, vers les États-Unis. Son intégration dans une Fédération européenne aurait donc permis à ceux-ci un leadership s'étendant du Pacifique au delà de l'Oural à moins que, délestée du Commonwealth, l'Angleterre ne fût intégrée toute nue dans le Fédéralisme européen, délivré de la tutelle américaine. Telles étaient les données du problème. Coudenhove-Kalergi pensait alors le résoudre en intégrant l'Europe dans un Commonwealth anglo-européen indépendant des États- Unis.

Mais en 1960, depuis deux ans, le Général de Gaulle est au pouvoir, c'est-à-dire, financièrement le groupe Rotschild, idéologiquement le Pacte synarchique.

Cette double considération ne doit pas être sous-estimée si l'on songe que depuis la fin de la guerre le "Big Business" américain, grâce aux accords de Dumbarton-Oak, jouait la carte maîtresse en France et en Europe. On a donc vu là, sans doute avec beaucoup de raison, un redressement de la situation des Rotschild, mais nous ajouterons un redressement à l'intérieur du système qui ne supprime pas pour autant les contradictions de celui-ci.

Quoi qu'il en soit, en juillet 1960, de Gaulle doit faire une tournée en Normandie. C'est l'heure des discours. Coudenhove-Kalergi, remis de ses tracas, prie le Général, dans une lettre ouverte, d'annoncer enfin un sérieux démarrage de l'Europe politique:

Après dix ans d'attente, l'heure de l'Europe a sonné: l'heure du référendum européen. Le destin nous offre une chance unique et inouïe; il a placé à la tête de la France et de l'Allemagne (5) deux grands européens désireux et capables de réaliser l'unité de notre continent.

(Le Figaro - 5 juillet 1960)


Dans sa lettre qu'il faut lire, Coudenhove relançait le Fédéralisme européen. Ceux qui voudront bien se reporter à la collection du Figaro verront que dans ses discours normands le Général fit prévoir en effet la mise en œuvre du programme... mais l'Algérie n'était pas liquidée. Coudenhove fut reçu à l'Elysée.
À l'issue de cette audience Coudenhove-Kalergi donnait, dans le Figaro du 26 septembre 1960 en page trois, un grand article titré: «Le Plan de Gaulle pour une Confédération». C'était l'Europe des patries et des États dans la patrie européenne.

Aussi longtemps que de Gaulle conduira les destinées de la France, il n'y aura pas d'unification européenne sans lui ou contre lui. Nous sommes placés devant l'alternative d'édifier la confédération européenne avec de Gaulle ou bien de renoncer pour un temps plus ou moins long à toute unification politique de l'Europe... Le destin même de l'Europe se joue sur l'acceptation ou le refus de l'initiative de de Gaulle.

N'allons pas si facilement sacrer grand homme le Général! À la lecture de ce texte du Grand-Prêtre synarchiste, jugeons plutôt des forces qui jouent derrière «l'homme du destin» et de la menace qu'elles contiennent sans, pour autant, prendre parti pour celles d'en face.

C'en est assez pour arriver à la fameuse conférence de Presse du mois de janvier 1963 excluant l'Angleterre du Marché Commun.

Cette conférence a été faite en accord avec Coudenhove-Kalergi. L'article du Figaro du 12 décembre 1962 nous fournit plus d'une raison de croire que des tractations avaient eu lieu qui faisaient pressentir l'échec de l'intégration de l'Angleterre à l'Europe pour des raisons économiques (et politiques) qui, à notre avis, n'ont jamais varié.

La conférence de presse du 14 janvier n'a été, à travers le cas de l'Angleterre, que la manifestation publique de la traditionnelle opposition et le coup d'éclat qui l'a fait entrer dans une phase plus aigüe. Les réactions exprimées au sein de l'Europe des six n'ont eu qu'une importance secondaire auprès de celles des États-Unis. L'opinion de l'Intelligentsia New-Yorkaise ne tarda pas en effet à se faire connaître par le discours du trop fameux Dean Acheson à l'Université de Berkeley (Le Figaro - 14 mars 1963) et par la réaction du Président Kennedy, travaillant à resserrer les liens avec Moscou tout au long de l'année. Cette réaction rendue plus efficace par la retraite d'Adenauer qui lui permettait de replacer l'Allemagne dans son propre jeu rencontra l'appui d'Erhard. Elle put inquiéter certains de part et d'autre de l'Océan jusqu'au jour où Kennedy fut assassiné. Mais, lui disparu, il n'en reste pas moins que l'Europe du Fédéralisme demeure encore en échec devant un leadership américain lui-même de plus en plus discuté (6).

Nous n'aurons pas la témérité de prédire le terme ni la nature des événements qui pourraient amener un compromis ou briser l'Occident. En pareille matière, la liberté et les passions humaines font durer ou précipiter les choses. D'un côté, l'assurance de Condenhove-Kalergi que l'Europe ne se fera ni sans de Gaulle ni contre lui, de l'autre, les prétentions new-yorkaises à l'intégration européenne assorties de convoitises sur une partie du Commonwealth peuvent s'opposer brutalement. Tout est possible en fait de surprises ou de conflits: l'U.R.S.S. intervenant ou l'Allemagne basculant du côté soviétique à la recherche de ses territoires perdus. Ces problèmes portent en eux les éléments du coup de force et de la violence. Mais, quelle que soit la forme d'unité qu'on adopterait, l'Europe qui se prépare est celle de la Contre-Église. Sur ce point l'avis du Frère-Maçon Y. Marsaudon, membre du Suprême Conseil de France (maçonnerie du Rite écossais) dans son ouvrage: "L'Oecuménisme vu par un franc-maçon de tradition" (1964), doit nous en convaincre:
NOUS POUVONS AFFIRMER QUE L'EUROPE MAÇONNIQUE, ELLE, SE FAIT...

Nous croyons en cela le Frère-Maçon Marsaudon. Oui, par l'une ou l'autre voie, elle se fait. Ce que la formule européenne du Général de Gaulle a certainement de plus raisonnable, non pas absolument, mais par rapport aux volontés intégrationnistes de l' American Establishment", est corrompu par son synarchisme, par ses appels à l'alliance soviétique visant à dissocier l'axe Moscou-New-York.

Tout cela prouve qu'aucune des deux voies n'est la vraie.
Et ici nous ne partageons pas les certitudes du Frère-Maçon Marsaudon car l'Europe ne sera jamais ce qu'elle peut et doit être si on veut en faire un consortium des seuls intérêts économiques toujours en concurrence ou, politiquement, une république mineure sous l'Imperium Mondial de la Contre-Église. Dans les deux cas son inexistence est assurée. Ses vieilles nations, en effet, irréductibles à une confusion que repousse leur séculaire enracinement dans la terre et dans les âmes, ne retrouveront leur unité que sur d'autres plans. L'Europe, c'est "cet ensemble de valeurs spirituelles et civiles que l'Occident a accumulées en puisant aux sources de chacune des nations qui la composent" (Pie XII) et qui, "communes et diversifiées, correspondent chez les peuples lointains à des besoins qui requièrent, appellent, commandent son unité rayonnante" et missionnaire. Il y eut toutefois une Europe qui n'était ni un seul état ni une fédération: c'était la Chrétienté, la "République Chrétienne". Les structures du passé abolies, il reste que "la foi catholique peut être un coefficient d'une valeur incomparable pour conférer une vitalité spirituelle à la culture fondamentale unitaire qui devrait constituer l'animation d'une Europe unifiée socialement et politiquement (Paul VI).


Notes:

(2) Kadmi-Cohen emprisonné par la Gestapo durant la guerre fut mis en liberté sur l'intervention du Maréchal Pétain avec l'aide du Nonce apostolique Mgr Valerio Va1eri. Il avait, parait-il, conçu un plan pour sauver les Juifs de France en les évacuant vers la Palestine. Le cabinet du Maréchal et la Nonciature avaient pourvu aux moyens financiers. Une maladresse (?) radiophonique de Londres fit découvrir ce plan, Kadmi-Cohen et son groupe furent arrêtés après l'occupation de Vichy par les Allemands et périrent à Dachau. Sa femme et ses enfants furent sauvés par un couvent. Ses fils sont parait-il aujourd'hui catholiques.

(3) Ce passage de Kadmi-Cohen appelle les réflexions suivantes:

1° - Il montre la filiation du fédéralisme synarchique actuel: Saint-Yves, Briand, le Pacte synarchique, Coudenhove-Kalergi, le Général de Gaulle.

2° - Il éclaire la continuité d'opposition doctrinale si l'on peut dire entre les "hautes autorités" américaines et européennes, mais cette opposition s'explique par des difficultés positives qu'il faudra résoudre.

A) - Souvenons-nous de la déclaration de Grant sur le choix des États-Unis comme nation-guide. Elle a eu lieu à l'époque où A. Pike, avec le Palladisme, avait réuni en un faisceau de nombreuses puissances maçonniques et où les hautes sociétés secrètes comme l'Hermetic Brotherhood of Light et les B'nai Brith fondaient sur les États-Unis la puissance matérielle exécutrice du plan synarchique mondial. Effectivement cet État joue son rôle mais, dans ce genre de travail, l'impérialisme national n'est admis que dans la mesure où il concourt au plan universel. Les États-Unis doivent penser au sort de Guillaume II et d'Hitler.

B) - Il est évident que la Pan-Amérique ne peut se concevoir synarchiquement sans le Canada, ce qui implique son détachement de l'Angleterre.

C) - Il est moins évident mais cependant important de considérer que l'Afrique composant, avec l'Europe, l’ "Eurafrique serait un coup très dur pour l'économie américaine et qu'il lui conviendrait mieux de voir une Afrique libre lui laissant la possibilité d'investir dans ce continent. D'où la déclaration de Walter Lipmann sur l'indépendance de l'Afrique du Sud du Commonwealth.
(Le Figaro - 23 mars 1962)

3° - Il souligne les raisons pour lesquelles l'Angleterre trouve difficilement un moyen d'agrégation avec l'Europe. Son Commonwealth n'est ni l'Europe, ni l'Eurafrique, et ferait d'elle la puissance arbitre de cette Europe en même temps que la Pan-Amérique serait amputée d'une partie de son territoire naturel: le Canada.

4° - Il jette un jour particulier sur le rôle primordial de la France dans les réalisations synarchiques en Europe et sur l'homme "inspiré", le Général de Gaulle, que Churchill avait appelé "l'homme du destin".


(4) Projet de fusion France-Angleterre. On se serait cru revenu au temps de Jeanne d'Arc! Nous avons attendu, pour être plus sûrs, les précisions de Raynaud lui-même affirmant la collaboration très active du Général de Gaulle dans cette affaire. C'est maintenant chose faite. On lira ces précisions dans le Figaro du 11 juin 1963.


(5) De Gaulle et Adenauer.


(6) C'est ce que constatait Coudenhove-Kalergi dans un article du Courrier industriel de Dusseldorf sur la dégradation des rapports franco-allemands:

... Il y a malheureusement, disait-il, des Européens d'Allemagne qui n'ont pas compris encore que seuls les Européens de France peuvent se permettre d'être gaullistes ou antigaullistes. De Gaulle n'est pas seulement un chef d'Etat, il est aussi le représentant de la nation française... Il est impossible actuellement en Allemagne de taire une politique pro-française et antigaulliste.

Il va de soi que les Européens allemands peuvent critiquer les propositions de de Gaulle, au même titre qu'ils critiquent celles d'Erhard. Les buts de la "Paneurope" ne sont pas non plus identiques à ceux de de Gaulle.

Nous sommes pour la fédération des États européens; nous trouvons nécessaire la participation de l'Angleterre sous une forme quelconque et nous rejetons l'Europe "de l'Atlantique à l'Oural". Depuis 42 ans, "nous n'avons pas varié, quels qu'aient été les régimes et indépendamment de leurs gouvernants...

(Le Figaro - 15 septembre 1964.)

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