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jeudi, mars 26, 2009

Au-dessus des partis politiques


Contrairement à une idée trop répandue au Canada, le Crédit Social n'est nullement un parti politique, même si un parti canadien s'est paré de ce nom.

Le Crédit Social est une doctrine, un ensemble de principes énoncés pour la première fois par un homme de génie, l'Écossais C. H. Douglas. La mise en application de ces principes, dans leur aspect financier, ferait l'organisme économique et social atteindre sa fin propre, qui est la satisfaction des besoins humains.

Le Crédit Social ne créerait ni les biens ni les besoins, mais il éliminerait tout obstacle artificiel entre les deux, entre la production et la consommation, entre le blé dans les silos et le pain sur la table. L'obstacle aujourd'hui, au moins dans les pays évolués, est purement d'ordre financier - un obstacle d'argent. Or le système financier n'émane ni de Dieu ni de la nature. Établi par des hommes, il peut être ajusté pour servir les hommes et non plus pour leur créer des difficultés.

À cette fin, le Crédit Social présente des propositions concrètes. Fort simples, ces propositions impliquent cependant une véritable révolution. Le Crédit Social ouvre la vision sur une civilisation d'un aspect nouveau, si par civilisation on peut signifier les relations des hommes entre eux et des conditions de vie facilitant à chacun l'épanouissement de sa personnalité.

Sous un régime créditiste, on ne serait plus aux prises avec les problèmes strictement financiers qui harcellent constamment les corps publics, les institutions, les familles, et qui empoisonnent les rapports entre individus. La finance ne serait plus qu'un système de comptabilité, exprimant en chiffres les valeurs relatives des produits et services, facilitant la mobilisation et la coordination des énergies nécessaires aux différentes phases de la production vers le produit fini, et distribuant à tous les consommateurs le moyen de choisir librement et individuellement ce qui leur convient parmi les biens offerts ou immédiatement réalisables.

Pour la première fois dans l'histoire, la sécurité économique absolue, sans conditions restrictives, serait garantie à tous et à chacun. L'indigence matérielle serait chose du passé. L'inquiétude matérielle du lendemain disparaîtrait. Le pain serait assuré à tous, tant qu'il y a assez de blé pour assez de pain pour tous. De même pour les autres produits nécessaires à la vie.

Cette sécurité économique, chaque citoyen en serait gratifié comme d'un droit de naissance, à seul titre de membre de la communauté, usufruitier sa vie durant d'un capital communautaire immense, devenu facteur prépondérant de la production moderne. Ce capital est fait, entre autres, des richesses naturelles, bien collectif; de la vie en association, avec l'incrementum qui en découle; de la somme des découvertes, inventions, progrès technologiques, héritage toujours croissant des générations.

Ce capital communautaire, si productif, vaudrait à chacun de ses copropriétaires, à chaque citoyen, un dividende périodique, du berceau à la tombe. Et vu le volume de production attribuable au capital commun, le dividende à chacun devrait être au moins suffisant pour couvrir les besoins essentiels de l'existence. Cela, sans préjudice au salaire ou autre forme de récompense, en plus, à ceux qui participent personnellement à la production.

Un revenu ainsi attaché à la personne, et non plus uniquement à son statut dans l'embauche, soustrairait les individus à l'exploitation par d'autres êtes humains. Avec le nécessaire garanti, un homme se laisse moins bousculer et peut mieux embrasser la carrière de son choix.

Libérés des soucis matériels pressants, les hommes pourraient s'appliquer à des activités libres, plus créatrices que le travail commandé, et poursuivre leur développement personnel par l'exercice de fonctions humaines supérieures à la fonction purement économique. Le pain matériel ne serait plus l'occupation absorbante de leur vie.

* * *

Mais, si logiques, si sociales et si respectueuses de la personne humaine que soient les propositions du Crédit Social, elles brisent radicalement avec des notions généralement reçues et considérées comme sacrées et intangibles.

C'est pourquoi le Crédit Social ne peut pas résulter d'un simple changement de parti au pouvoir. On n'impose pas une civilisation nouvelle par une élection. Il faut d'abord la faire connaître, la faire désirer, la faire rechercher par la population. Et puisqu'il s'agit d'une civilisation créditiste, disons qu'il faut d'abord développer une mentalité créditiste, faire prévaloir une attitude d'esprit favorable à la vision présentée par le Crédit Social.

La population du Canada n'en est pas encore là. M. Low et les dirigeants de son parti, faussement appelé créditiste, le savent bien, puisque, pour briguer les suffrages de l'électorat, ils commencent par supprimer le dividende du Crédit Social de leur programme officiel.

Le problème n'est donc pas de mousser un parti politique, mais de faire connaître, aimer et désirer le Crédit Social.

D'ailleurs, la seule conception de parti contredit la philosophie du Crédit Social. Les partis existent pour essayer de prendre le pouvoir et ne s'agitent bien que lorsque est ouverte la lutte pour le pouvoir. Le Crédit Social, lui, distribuerait le pouvoir le plus largement possible entre tous les membres de la société. Le pouvoir économique, par un pouvoir d'achat garanti à chaque individu. Le pouvoir politique, en faisant des députés les représentants réels de leurs électeurs, et non plus les domestiques d'un parti.

Il faut que les électeurs apprennent à exprimer leur volonté commune en tout temps. C'est entre les élections que se prennent les décisions qui affectent la vie des citoyens. Se contenter de voter pour un candidat de parti, puis accepter passivement tout ce qui se décide sans l'avis de ceux qui doivent faire les frais des décisions, c'est de l'infantilisme politique.

Vers Demain, 15 mai 1957

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